LA NEWSLETTER DU SAMA DE NOVEMBRE 2018



                 
 
REFLEXIONS SUR ICI ET LA-BAS OU SUR LE PRESENT ET LE PASSE
 MOT DU PRESIDENT

Nombre d’adhérents du SAMA ont fait le saut dans le secteur civil au moment qu’ils pensaient propice.

Notre ami Jean Charles a été contraint par la maladie de quitter le Service et son Afrique. Pour ne pas s’ennuyer il a également tenté ce saut vers un autre monde. Il y a été très bien accueilli par le Pr Gentilini.

Sans doute sa force de caractère, son expérience de terrain, mais aussi la renommée de la formation complémentaire reçue dans les écoles du SSA ont beaucoup compté pour cette intégration réussie.

Nous découvrons un Jean Charles poète et philosophe. Comme Houdard de la Motte qui a découvert à vingt ans que la cruauté du monde pouvait être supportable après avoir passé deux mois au couvent. Il s’y était réfugié après avoir subi les quolibets des spectateurs du Théâtre Italien où était jouée la pièce qui devait lui apporter la renommée !

Jean Charles a d’autres cordes à son arc. Gibriaçois à ses heures, son vin est apprécié des connaisseurs.

Cette année encore il en offre six bouteilles pour notre tombola à laquelle je vous invite à venir très nombreux.   
                                                                   
Dr Gérard DESMARIS   

En 1988, j’ai quitté pour raisons de santé, les armées. Je n’avais que 46 ans et selon les statisticiens, il me restait une quarantaine d’années d’espérance de vie. Sans plan B, je savais aussi depuis le collège que « l’ennui naquit un jour de l’uniformité ». Petite phrase qui termine un très beau texte poétique* écrit au 18e siècle par Antoine Houdar (ou Houdart) de la Motte.

Et si pour moi, une fois l’uniforme ôté, ce jour-là était arrivé avec l’ennui pour avenir (40 ans). Heureusement le chef de service de médecine tropicale de la Salpêtrière, le Professeur Marc Gentilini appelé à l’aide, bien que ne me connaissant pas, m’a proposé dans un premier temps de venir assister au Staff du service, puis dès que mon état de santé le permettrait, de venir renforcer son équipe de médecins-conseils par téléphone pour les maladies liées aux voyages. J’y suis resté 27 ans, y répondant à 115 000 appels, dans un petit bureau loin du Sahel…Heureusement, ces appels étaient très variés, fluctuant en fonction des titres de la presse et de la télévision : SRAS, GRIPPE AVIAIRE, DENGUE, et les incontournables PESTE et CHOLERA.

  • Je n’étais pas venu demander un emploi à plein temps, mes nombreux séjours outre-mer presque sans interruption de 1969 à 1983 m’avaient valu une pension de retraite.
  • Je n’étais pas venu chercher un poste honorifique, même si pour moi sachant d’où je venais (une année en pyjama dans un hôpital francilien) cela en était un. Par ailleurs, dès mes premiers séjours au Cameroun (1969 – 1973), j’avais obtenu à 27 ans mon bâton de Maréchal : tous les dimanches j’allais travailler à cheval, accompagné par mon chien. Des enfants en âge scolaire amusés par ce mode de transport, m’attendaient à mi-chemin pour me faire une haie d’honneur jusqu’à la porte de mon bureau en chantant « Médecin Kaélé, Médecin Camerounais ». Quel honneur pour moi de les entendre chanter dans ma langue, car je savais qu’en général l’utilisation du français à cet âge se limitait à l’enceinte des écoles. Nos amis africains disent souvent « Vous avez de la chance car vous êtes tous comptés ». Il est vrai que mes compatriotes (66 millions) et moi-même avons tous un numéro d’identification à vie. Mais comment leur faire comprendre que s’ils viennent ici ils seront à leur tour anonymes ? « Chacun sa route, chacun son destin » c’est l’air du film « Un indien dans la ville ». Cela fait réfléchir sur ici et là-bas. Justement, là-bas, même mon chien pourtant né de parents inconnus, était respecté et connu. J’étais allé participer à une réunion de travail à la Sous-Préfecture de Kaélé, sur la rage canine. Juste avant la fin de la réunion que j’avais initiée, le voile fermant la porte d’entrée se soulève, poussée par la truffe d’un chien de brousse sans collier, qui après avoir fait le tour des participants, s’installe sur le podium aux pieds du Sous-Préfet. Un des participants prend la parole pour demander si ce chien était un chien errant, ceux-là mêmes qui transmettaient la rage en ville ! Le Sous-Préfet use de son autorité pour dire : « Non, ce n’est pas un chien errant, c’est le chien du Docteur ». Cette sentence étant confirmée par l’ensemble des participants, comme j’aurais voulu être ailleurs ce jour-là, il n’y a pas que le soleil qui fait rougir !
  • J’étais venu demander une aide à la reconversion que je n’avais pas préparée. Je sais qu’elle est maintenant réussie et que je pourrai continuer mes réflexions personnelles sur le présent et le futur car celui-ci est enfin assuré à l’I.N.I. grâce à vous toutes et tous qui êtes restés à mes côtés, grâce à toutes et à tous qui m’avez rejoint. Monsieur Gentilini, ma famille, mes amis et mes camarades des Ecoles de Bordeaux et du Pharo, encore merci…

Avez-vous remarqué que j’ai intitulé ce texte d’inspiration libre « Réflexions sur ici et là-bas « ? Je n’ai pas encore écrit de texte sur ici et là-haut ! Ou sur le présent et le futur car nul ne le connaît ! Était-ce dû à cette période hyperactive et surtout très réactive où il fallait toujours démarrer au quart de tour que j’avais commencé à oublier l’essentiel, à savoir : si « L’HOMME PROPOSE – SEUL DIEU DISPOSE » ? D’où la nécessité de ce retour sur terre, un peu brutal certes. Combien de plans B bien ficelés ne se sont jamais réalisés ! J’en avais moi-même envisagé un qui aurait dû commencer justement en 1988 (hasard ou pressentiment ?).  Il ne s’est jamais réalisé car il eut fallu que je sois encore « médicalement apte à servir en tout temps et en tout lieu », comme je l’avais été déclaré en 1969 au Pharo avant mon premier départ outre-mer.

Jean Charles Remy

Trésorier Honoraire du SAMA

A Plaisir (Yvelines), le 18 Juin 2018, anniversaire de l’appel du Général de Gaulle.

Les Amis trop d’accord, Fable XV par Antoine Houdar (ou Houdart) de la Motte

Il était quatre amis qu’assortit la fortune ; 

Gens de goût et d’esprit divers.

L’un était pour la blonde, et l’autre pour la brune ;

Un autre aimait la prose, et celui-là les vers.

L’un prônait-il l’endroit ? L’autre prônait l’envers.

Comme toujours quelque dispute

Assaisonnait leur entretien,

Un jour on s’échauffa si bien,

Que l’entretien devint presque une lutte.

Les poumons l’emportaient, raison n’y faisait rien. 

Messieurs. dit l’un d’eux, quand on s’aime,

Qu’il serait doux d’avoir même goût, mêmes yeux ! 

Si nous sentions, si nous pensions de même,

Nous nous aimons beaucoup, nous nous aimerions mieux.

Chacun étourdiment fut d’avis du problème,

Et l’on se proposa d’aller prier les dieux

De faire en eux ce changement extrême. 

Ils vont au temple d’Apollon

Présenter leur humble requête ; 

Et le dieu sur le champ dit-on, 

Des quatre ne fit qu’une tête : 

C’est-à-dire qu’il leur donna

Sentiments tous pareils et pareilles pensées ; 

L’un comme l’autre raisonna.

Bon, dirent-ils, voilà les disputes chassées                                              

Oui, mais aussi voilà tout charme évanoui ; 

Plus d’entretien qui les amuse.

Si quelqu’un parle, ils répondent tous, oui.

C’est désormais entre eux le seul mot dont on use. 

L’ennui vint, l’amitié s’en sentit altérée.

Pour être trop d’accord, nos gens se désunissent, 

Ils cherchent enfin, n’y pouvant plus durer,

Des amis qui les contredisent.

C’est un grand agrément que la diversité. 

Nous sommes bien comme nous sommes. 

Donnez le même esprit aux hommes ; 

Vous ôtez tout le sel de la société.

L’ENNUI NAQUIT UN JOUR DE L’UNIFORMITÉ.

*Les amis trop d’accord, extrait de Houdar (ou Houdart) de la Motte, Antoine : Fables Nouvelles: avec un discours sur la fable. Paris, Dupuis 1719, Fable XV, Tome II. Houdar de la Motte, écrivain, critique et dramaturge français, est né le 17 janvier 1672, et mort le 26 décembre 1731.

Prochaine Assemblée Générale 2019: Avez-vous des idées quant à la ville où pourrait avoir lieu l’Assemblée Générale 2019 ?  Toutes les propositions seront les bienvenues.